L’information n’attend pas

Togo- Ve République/ David Kpelly : « J’ai finalement compris. Mon ami a raison, c’est fini pour notre génération et celle à venir » –

Au Togo, l’alternance politique, ce rêve caressé par tant des Togolais, semble désormais hors de portée. Avec la Ve République et son régime parlementaire, le peuple se voit privé de la possibilité d’élire directement son président, un coup dur porté aux espoirs de changement. Sur Facebook, l’écrivain togolais David Kpelly ne cache pas son indignation et son désespoir. Pour lui, cette nouvelle république, mijotée par le régime en place, signe la fin des ambitions de toute une jeunesse.

« Régime parlementaire. 5e République. Président du conseil des ministres…

Sénat !  Pour un pays de 56600 Km², à peine 8 millions d’habitants, avec une centaine de députés dont personne n’a jamais su mesurer l’utilité. Des sénateurs, élus et nommés. Une majorité de vieux roturiers politiques engraissés depuis des décennies par l’argent public, qui vont de nouveau se mettre à émarger, à coups de millions, sur le dos du contribuable togolais pour faire ce qu’ils ont toujours fait de leur vie: ne rien faire.

Ce matin je me suis réveillé avec une très profonde tristesse. Depuis une quinzaine d’années, un de mes amis, de la même génération que moi, exilé en France presque au même moment où je quittais le Togo, m’a toujours répété que c’était également fini pour notre génération, comme celle de nos pères, et que nous avions, aussi, manqué notre rendez-vous avec notre pays.

Toujours, je lui ai répondu qu’il exagérait,  que c’était juste une question de temps, que les choses changeraient rapidement et que nous retournerions chez nous bientôt. Je lui ajoutais, avec une pointe d’humour, que c’était la raison pour laquelle je préférais ne pas trop m’éloigner comme lui, rester dans les parages, pour vite rentrer avant lui.

A mon réveil, aujourd’hui, j’ai finalement compris qu’il a raison. Ni lui, ni moi, ne sommes plus des jeunes hommes de 20 ou 30 ans. Mais des adultes ayant désormais passé presque autant de temps dehors que sur notre terre natale, et qui n’avons plus, dans les conditions ordinaires, plus de trois décennies à vivre.

Je lui ai laissé ce message sur WhatsApp : ” Tu as raison.” Il a lu et n’a pas cherché à me demander sur quel point je lui donnais raison.

Parce qu’il a compris que je n’ai pas dormi de toute la nuit, tourmenté par le lugubre spectacle politique qui se joue actuellement sur notre terre. Il a, je crois, arboré un sourire amer et a murmuré : ” Tu aurais dû comprendre ça depuis, cher ami, notre réconciliation avec l’âme du Togo n’aura pas lieu. »

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